Diabologum – 365 jours ouvrables

Je suis d’une génération qui devait lire Sartre et Camus car l’existentialisme était le fin du fin de l’histoire d’en rire sans esquisser un mouvement de lèvres.

Je ne lis plus ces gens et j’ai essayé d’écouter La peste, il y a quelque temps, sans pouvoir aller jusqu’au bout… Et je n’ai pas non plus adhéré aux nouveaux courants ; je suis un démodé, mais pas un inactuel, genre arrivé trop tôt, mes contemporains étant les gens de demain, à la Nietzsche. Non, je suis le Nokia 3310 de la philosophie, le modem 56k de mes couilles pleines de mots, le mec qui a cru et tant vont les Cruchot à l’eau de leur désillusion qu’ils décrochent à plus soif. Et, au fond, c’est pas mal dans le mille de l’existentialisme tendance nihiliste tout ça, sans l’amour qui sauve tout et la transcendance horizontale d’un bon pauvre à qui flanquer de la bonne charité qui vous sauve de la dépression et vous vaudra de la réduction de peine en Enfer.

Heureusement, s’il ne devait rester qu’une chose de ce courant algéro-germanopratin, à part perdre sa vie sur les réseaux sociaux, les sites de rencontre et la télévision – et sortir dans un bar de temps en temps pour jouer à l’Homme Révolté qui explique au garçon de café1 qu’à lui on l’a lui fait pas …fuck la phrase postmoderne, où j’en suis ? …ce serait en musique. On pourrait alors retenir ça :

Et presque tout l’album #3 ; 1996… Ou Nevermind de Nirvana, 1992. Le grunge avant les suicides de Kurt Cobain et de Chris Cornell ; Eddie Vedder ne doit pas être assez gênant pour qu’il n’ait pas besoin de partir avant l’heure que lui a prévu Allah (oui, oui, blasphème, je suis sûr qu’il n’est qu’un sous-Dieu incapable de protéger les siens) … Les débuts de Noir Désir, avant que Cantat ne soit plus qu’un empileur de calembours et que ça termine avec une grosse gifle fatale sur la tête de l’actrice qui lui aura tourner la sienne au chanteur… Et la pauvre femme, dans tout ça, Krisztina Rády, digne jusqu’à forcer l’admiration et morte elle aussi2. En musique aussi, je suis un démodé, mais, là, je n’ai rien renié.

Cela dit, je ne fume pas : amis vendeurs de dépression, vous pourrez prendre quelques pièces de mon cadavre pour les donner aux veaux de votre époque. D’ici là je vendrai chère ma peau et n’en finirai pas de deviser sur cette idée : « le mal du siècle, c’est l’emballage »…

Photo d’entête : “Big Air Package” par Ad Bercht.

Notes

  1. Qui, lui, joue au garçon de café ; Sartre vous vous souvenez ?
  2. A qui aucune brailleuse hystérique, trop occupées à coucher avec des partouzeurs pour en faire des livres à charge ou à dénoncer les mâles qui les empêchent couiner nuits et jours, n’aura pensé consacrer un roman. Il fallait faire de Marie Trintignant l’égérie de la cause des femmes, elle était connue, elle était transformable en marchandise bienpensante ; l’autre, là, la hongroise même pas connue, qu’est-ce qu’on s’en fout, hein les filles ?