Les Porcs [2017] de Marc-Edouard Nabe

Nabe n’est plus qu’une vieille tenancière de bordel branlant, qui retient votre attention grâce aux trous qu’elle a placés un peu partout dans son établissement : dans les douches, aux toilettes, dans les chambres ou encore les abattoirs où quelques cochonnes se disputent des vieux bouts de gras… En échange de longues tirades sur la beauté de sa foune (fânée) et de ses courbes (aplaties), qu’il faut bien entendre en sirotant des jeux de mot aussi souvent potaches et lourdingues que bons1, on peut venir dans cette porcherie, assouvir son goût malsain pour le voyeurisme. Plus drôle que Les Caractères de la Bruyère ou que Cioran, on voit donc l’absence totale de couilles du bande-mou Moix, les errements d’un certain Alain Soral (que je ne connais pas – je n’ai pas les moyens de me faire racketter), la pitrerie creuse des hommes de télévision, le fard sur les joues des vieilles réactrices, le ridicule des arrière-cours des châteaux de verres sales, Dieudonné (ses derniers coups d’éclats et son déclin), Blanrue, Laïbi, ad lib.

La vieille maquerelle vous empêche parfois de bien voir, qui vient vous expliquer combien ses échecs sont des réussites totales pleines de filouterie et de cet art subtil qu’à l’époque elle avait appris à Sun Tzu, elle vous empêche de jouir totalement du spectacle en retenant votre main gauche pour vous emmener en Syrie ou en Iran, parler politique, on aimerait même assez volontiers aller éradiquer Israël avec elle et rendre leur terre aux Palestiniens, mais juste qu’elle nous laisse nous pignoler un peu plus avec ses portraits, car, il faut bien l’avouer, on vient surtout ici pour les autres.

Certes, elle dira que c’est par jalousie, par refus d’accepter que nous la considérons comme notre maîtresse (eh non, même Céline m’emmerde assez, sur la forme, à vrai dire), que nous sommes des pédés refoulés qui refusons de nous faire enculer2 comme Angot l’a été par Littell (et sur ce coup : chapeau lard triste), ou autres quolibets bébêtes dont il nous aurait affublé s’il nous connaissait, donc si nous fréquentions la dissidence (rien à voir avec ces gens-là, je vous assure !) ou le marigot parigot.

Donc voilà, ça se lit à une main comme on regarde un porno en prenant conscience de l’humiliation que la situation devrait nous faire ressentir (voir un type mieux que nous se faire une fille qu’on n’aura jamais, dans une séquence de cinéma où tout est faux et monté, quelle honte et quelle bêtise…) – oui, mais pour l’amour Muray est mort…

B.O.B.

Philippe Katerine – Louxor

Notes

  1. Oui, mais Revel et Muray sont morts en cette funeste année 2006, on fait avec ce(ux) qui reste(nt)…
  2. Si, si, dans un monde où le Covid-19 est dangereux et Biden a gagné sur Trump, 2+2=7 et tout peut être dit. Et puis depuis Deleuze, l’enculade est devenue philosophique et non-genrée…