Pénible appendice que le pénis !

Le monde est mal fait. Le monde est injuste. C’est sans cesse le Nord et ses excès ostentatoires, et le Sud qui est en manque. Ainsi, en France, un petit exhibitionniste de 9 ans – probablement déjà corrompu par la banalisation de la pornographie à la télévision – après avoir montré son vigoureux bitogno à des jeunes camarades qui ne semblent pas avoir vraiment gouté les ardeurs du spectacle de ce petit drôle en culotte baissée, s’est vu menacé par son professeur de voir passé « tout ce qui dépasse » à un coup d’un cutteur censeur.

D’émasculation point, rassurez-vous, mais le professeur – malgré le soutien de tous – s’est vu aujourd’hui infligé une amende de 500€ avec sursis (et a aussi été arrêté par sa hiérarchie), pour cette réprimande blagueuse qui ne semble pas avoir traumatisé l’enfant plus que ça. A moins qu’une cellule psychologique ne l’ait aidé, action secondée par un traitement médical puissant, et chapeauté par un grand pardon de la Nation qui aura permis à l’enfant de tourner la page (les médias nous cachent tout, alors on ne sait jamais !). Pendant ce temps-là, dans l’hémisphère sud, au Kenya plus précisément, c’est un jeune homme tout aussi vigoureux qui veut poursuivre en justice les dirigeantes du G10, un regroupement d’associations de femmes, qui a appelé à un boycott sexuel national pour « pour protester contre les différends qu’entretiennent le Premier ministre et le Président de la République » (Afrik.com) ; différends qui ont fait, au passage, 1500 morts. Déclenchée fin avril, cette grève d’un genre étonnant (oui, la femme est un puits de mystère !), suivie même par des prostituées dédommagées à l’occasion pour compenser les pertes financières causées par leur adhésion à cette entreprise, met les hommes à rude épreuve. Ainsi de ce malheureux souffrant, depuis quelques jours donc, d’« anxiété » d’« insomnie », d’« angoisse, du stress, de migraines et un manque de concentration », suite à l’abstinence obstinée que lui fait subir sa femme. Partant tout penaud et la queue entre les jambes d’une couche nuptiale où il n’a plus rien à faire d’autre que se coucher, le pauvre hère est bien embarrassé de cet appendice désormais inutile qui lui fait connaitre l’Enfer sur Terre. On pourrait tirer trois enseignements de ce fait :

  • tout d’abord cet homme est moins respectueux du choix de sa femme : d’autres auraient réglé ça de manière très virile et sans autre forme de procès – voilà pour le côté positif
  • il faudrait quand même que l’Eglise (qui doit avoir en son sein quelques spécialistes, tout de même) saute sur l’occasion pour montrer aux jeunes kenyans comment, avec l’aide de cinq doigts et quelques coups de baguettes propres à faire jaillir des sources miraculeuses, on peut à moindre frais arrêter de propager le sida – voilà pour la solution
  • ces grèves du sexe sont vraiment des pratiques barbares, d’un autre âge, et je demanderais à la Halde de brûler toutes les éditions du Lysistrata d’Aristophane – première occurrence de cette méthode – pour éviter que ces façons de (ne pas) faire odieuses, répugnantes, et hautement condamnables n’arrivent jusqu’en France1 – voilà un danger qui n’a pas à rougir devant d’autres fièvres

Moi, c’est surtout le rapprochement de ces deux individus qui m’intéresse 2. D’un côté un petit nanti dégoulinant d’obscénité qui a su placer son engin sous les feux de la rampe médiatique et réussi à foutre dedans un pauvre professeur ; de l’autre, un homme brûlant de désir, pris au milieu d’une situation politique explosive qui le dépasse, et qui, comme d’autres rustres frustrés, n’y coupera pas et devra laisser le sien à l’ombre et n’a plus rien à foutre. Tout ça est quand même vachement mal foutu, non ?

[Publié initialement dans La Catallaxine, le 5 décembre 2009]

Photo d’entête :

Notes

  1. En tout cas, sérieusement, pour détendre des relations ce n’est sûrement pas le bon procédé… De Maistre, par exemple, se servait de la prude moralité enseignée au jeune fille pour « sublimer » le trop plein d’énergie des hommes, notamment via la guerre, quand les femelles bonobos apaisent les tensions par des caresses… Ne penser qu’à faire l’amour histoire de ne pas avoir le temps pour la guerre, me parait plus efficace que de ne pas faire l’amour pour combattre la guerre…
  2. Ne me faites pas penser ce que je n’ai pas pensé, hein ! Je n’ai pas 500 € à mettre pour ces bêtises !